Roberto Azevêdo prendra officiellement la tête de l'OMC en septembre prochain (photo: internet) |
On pressentait Lula à l’ONU, on voyait le cardinal Odilo
Scherer au Vatican mais le Brésil passe sur le devant de la scène internationale à Genève. Le
brésilien Roberto Azevêdo est le nouveau directeur-général de l’Organisation
Mondiale du Commerce et succède ainsi à Pascal Lamy. Le Brésil prend pour la
première fois la tête d’une institution internationale d’une telle ampleur.
Pour accéder au poste, Roberto Azevêdo a recueilli le plus
grand nombre de votes et l’appui de pays de toutes les régions du monde et de
différents niveaux de PIB. Il devance ainsi son concurrent, le mexicain
Herminio Blanco, qui avait pourtant les faveurs des Etats-Unis et de l’Union
Européenne. Sa désignation sera officialisée demain et les soutiens de M.
Blanco ont d’ores et déjà affirmé qu’ils ne s’opposeront pas à la désignation
du vainqueur malgré leur droit de véto.
Roberto Azevêdo reprendra les commandes de l’OMC à partir de
septembre prochain et succédera au français Pascal Lamy. Fort des soutiens des
pays d’Afrique, du Moyen-Orient, de l’Amérique Latine et, surtout, du géant chinois,
il aura la lourde tâche de confirmer les aspirations internationales du Brésil
et de redorer le blason de l’institution, fortement critiquée depuis l’arrivée
de la crise.
Pendant la campagne, Roberto Azevêdo, représentant permanent
du Brésil à l’OMC depuis 2008, s’est prononcé en faveur de la reprise des
négociations du Cycle de Doha, au point mort depuis 2001, en déclarant qu’il va s’agir «de
rendre le système compatible avec le monde d’aujourd’hui, la seule façon d’y
arriver est d’encourager le commerce et la libéralisation des échanges en tant
que composants essentiels des politiques de développement ». L’objectif sera
donc de réactiver les négociations commerciales entre le Nord et le Sud.
Le succès du brésilien sonne comme la revanche des émergents
suite à la décision de reconduire un représentant européen (Christine Lagarde)
à la tête du FMI après la chute médiatiquement spectaculaire de Dominique
Strauss-Kahn. En mai 2011, les BRICs avaient dû se résigner à s’incliner face à
cette décision malgré leur tentative de hisser un des leurs sur les plus hautes
marches de la gestion économique internationale.
Un brésilien à l’OMC, c’est, pour la diplomatie brésilienne,
l’acceptation de l’idée défendue par le Brésil de partager le pouvoir
économique pour le rendre plus compatible avec la donne économique issue de la
crise financière internationale commencée en 2008. A l’heure où les émergents
apparaissent comme des modèles en termes de compétitivité, de gestion sociale
et de croissance du PIB, la logique veut qu’un de ses intégrants soient aux
rênes d’au moins un des trois piliers de l’économie mondiale (FMI, Banque
Mondiale et OMC). «En présentant sa candidature, le Brésil estimait que par son
expérience et son implication, (Roberto) Azevedo pourrait conduire
l'organisation vers un ordre économique mondial plus dynamique et plus juste.
Ce message a été entendu (...)» se félicite Dilma Rousseff à l’annonce des
premiers résultats à Genève.
Si cet événement sonne comme une meilleure répartition des
rôles plus en phase avec le contexte politico-économique actuel, il est
également considéré comme une victoire pour la diplomatie brésilienne qui y
voit l’aboutissement de ses efforts pour imposer l’image d’un Brésil capable et
désireux de prendre en main l’intérêt commun. Le pays peut désormais sortir de
son rôle de « représentant des BRICS » pour enfin adopter une posture
de décideur.
Gauthier Berthélemy
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire