Ce week end, les brésiliens choisiront leurs maires et conseillers municipaux (photo: internet) |
Le 7 octobre, les
électeurs brésiliens devront se rendre aux urnes pour élire leurs
maires et conseillers municipaux. La toute jeune démocratie, née de
la chute de la dictature militaire à la fin des années 80,
s'apprête à vivre une nouvelle élection municipale entre
nouveautés et vieux démons.
Depuis plus d'un mois,
façades, voitures voire même bicyclettes se sont transformées en
supports de propagande politique. Les enceintes, installées sur les
toits des véhicules, hurlent slogans et musiques partisanes,
reprenant parfois les tubes du moment. Et toujours le même refrain.
Celui des codes correspondant aux candidats aux différents postes à
pourvoir lors du prochain scrutin que les électeurs sont invités à
taper sur les claviers des urnes électroniques maintenant équipées
de la technologie biométrique.
Cette année, ils se
disputent les sièges de maires et de « vereadores »,
sorte de députés municipaux. Les places sont réduites mais les
prétendants foisonnent. Rien qu'à São Cristovão, dans l'intérieur
de Sergipe, près de 280 candidats se sont présentés pour occuper
les quelques 15 sièges de vereadores disponibles. A Aracaju, la
capitale, ils sont 428 pour 24 places. Certains donnent même le
sourire. Les lecteurs de la presse française ont d'ailleurs pu faire
la connaissance des fantasques candidats d'Aracaju. En effet, dans la
capitule nordestina, une lutte ardue et fratricide entre Batman et
Robin fait rage pendant que Ben Laden remonte à la surface pour nous
parler de la corruption.
« Ils vous prennent
pour des clowns, alors élisez-en un comme vereador » répète
l'ubuesque candidat Soneca pendant l'horaire électoral. Pour ces
candidats, il s'agit surtout de ridiculiser le monde politique qu'ils
considèrent superficiel et déconnecté des attentes des électeurs.
Mais il existe une autre explication. Au Brésil, quelque soit le
candidat, les votes qu'il recevra seront comptabilisés en faveur du
parti auquel il est affilié. Le nombre de votes valides est divisé
par le nombre de places disponibles à la chambre des vereadores,
donnant le quotient électoral. Le nombre de voix récolté par le
parti est alors divisé par ce quotient donnant ainsi le nombre de
places attribuées à la formation politique.
En d'autres termes, les
hurluberlus politiques d'Aracaju et autres, surfant sur la vague du
clown le mieux élu du Brésil en 2010, Tiririca, ne sont en réalité
que des « attrape-votes ». Leur popularité et leur
apparence contestataire attirent les votes des électeurs et gonflent
ainsi les quotients électoraux des partis en lice. Nul besoin de
présenter des idées, un bouffon suffit. Et parfois à grand frais
puisque grâce à ce système certains candidats liés à la
corruption et autres crimes politiques parviennent à retrouver leurs
fonctions sans que la population s'en aperçoive.
Un phénomène qui
pourrait mettre à mal l'une des nouveautés du scrutin. Les
électeurs peuvent désormais consulter sur internet la « fiche
d'identité » politique des différents candidats. CV, état
civil, patrimoine, antécédents judiciaires, presque toute la vie du
concurrent y est présentée. C'est le principe de la « Ficha
limpa » (fiche propre) que la Justice électorale brésilienne
tente d'insuffler chez les électeurs. A coup d'affiche et de spots
TV, l'administration cherche à faire disparaître le péril qui rôde
autour de la toute récente démocratie : la corruption. Dans un
pays où le vote est obligatoire et l'arrangement à l'amiable une
coutume, il n'est pas rare de voir un candidat promettre aux
personnes peu concernées ou peu informées des emplois ou autres
avantages en nature ou monnaie sonnante et trébuchante en
contrepartie de leurs votes. Et c'est à cette mauvaise habitude que
le gouvernement a déclaré la guerre en donnant aux électeurs les
moyens de savoir pour qui ils peuvent être amenés à voter.
Les mairies sont
disputées
Les grandes villes du
pays sont les théâtres de batailles acharnées entre les différents
camps politiques. Dans un contexte judiciaire riche en événements
dus aux procès pour corruption (Cachoeira et Mensalão) et quelques
mois après les démissions ministérielles et les manifestations
réclamant « un coup de balai dans l'administration » les
débats se concentrent sur la notion du vote propre.
Le parfait contre-exemple
vient d'où on l'attendait le moins, de l'ancien président Lula.
Soucieux d'assurer le maximum de voix pour la mairie de São Paulo à
son ancien ministre de l'éducation, Haddad, l'homme le plus aimé et
respecté du Brésil a fait un pacte avec le diable politique :
Paulo Maluf. L'ancien responsable politique est trempé dans
tellement d'affaires de fraudes électorales, de corruption et de
détournements de fonds qu'il possède sa propre fiche au sein du
système d'Interpol. Un gros poisson. L'entente électorale a fait un
flop et le candidat de Lula est bien trop loin dans les sondages pour
inquiéter le rival de toujours de l'ancien métallurgiste, José
Serra, lui-même en difficulté dans les enquêtes d'opinion.
A Aracaju, le maire
actuel ne pouvant se représenter après ses deux mandats successifs,
la bataille s'intensifie essentiellement autour du transport public
et de la sécurité. D'un côté, Valadares Filho, candidat soutenu
par l'administration sortante peine dans les sondages malgré une
amélioration suite aux interventions télévisées de Dilma Rousseff
et de Lula en sa faveur. Le député fédéral du Parti Socialiste
Brésilien souffre du déficit de popularité du maire sortant mais
surtout de la superpopularité de son adversaire.
Face à lui, João Alves
Filho, le Negão (le grand noir), comme il est surnommé par la
population. Ancien maire de la capitale dans les années 70, indiqué
par la dictature militaire qu'il a soutenu par sa participation à
l'ARENA (l'ancien parti officiel de la junte), il est paradoxalement
le candidat du parti démocrate. Constructeur immobilier, il a su
marquer la ville de son empreinte en donnant à a propre entreprise
la tâche d'édifier les grandes construction de la capitale
sergipana. En tête dans les sondages, la question qui se pose à
Aracaju est de savoir s'il y aura ou non un second tour.
Gauthier BERTHELEMY
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