Le 1er avril est connu
dans diverses régions du monde comme le jour de la farce. Au Brésil, il en est
de même, mais cette date rappelle également un fait historique important pour
le pays : le coup d’Etat militaire du 1er avril 1964. Ce lundi,
les archives publiques de São Paulo mettent en ligne 274 000 fiches et 13 000
rapports produits par le Département d’Ordre Politique et Social, la police
politique entre 1964 et 1985. A peine 10% du total archivé.
Les explications. La prise du
pouvoir par les généraux a été le résultat d’une série d’événements à partir de
l’élection en 1961 de Jânio da Silva Quadros du PTN (Parti Travailliste
National) à la Présidence de la République brésilienne et de João Goulart, o
Jango, du PTB (Parti Travailliste Brésilien) à la Vice-Présidence. La même
année Jânio Quadros renonce au pouvoir et le laisse aux mains de son Vice. Mais,
ce dernier se trouve alors en Chine pour une visite diplomatique. Les
militaires, voyant dans ce déplacement une preuve supplémentaire de sa
sympathie pour le communisme, l’empêche d’assumer la Présidence. Ce n’est qu’après
d’âpres négociations que João Goulart est nommé Chef d’Etat. En 1963, un
référendum décide le retour au régime présidentialiste et Jango en reprend la
tête.
Cependant, les difficultés ne
faisaient que commencer. Le Brésil était en proie à une instabilité politique
depuis les administrations antérieures. La tentative de renversement de 1961 et
les tensions régionales et internationales provoquées par la Guerre Froide
déstabilisaient un peu plus encore le fragile régime de Jango. Parmi la
société, les secteurs les plus conservateurs comme l’armée, le haut-clergé
catholique et les organisations et entreprises liées aux Etats-Unis faisaient
un travail idéologique visant à décrédibiliser le pouvoir en place.
Le 13 mars 1964, en pleine
tourmente politique, João Goulart annonce à Rio de Janeiro une série de décrets
face une foule de plus de 300 000 personnes. Il déclare alors la
nationalisation des raffineries de pétrole et présente un programme d’expropriation
de grands propriétaires terriens pour mener à bien la réforme agraire qu’il
supporte. Pour ses opposants conservateurs, c’est la goutte d’eau. Le 31 mars,
l’armée marche sur Rio de Janeiro et fait tomber le gouvernement
constitutionnel de Jango. Le 1er avril, le Président déchu prend la
fuite vers l’Uruguay, le Brésil est aux fusils des militaires.
Le nouveau régime ouvre les
frontières et laissent les capitaux étrangers opérer ce qu’on appellera au
Brésil et ailleurs le « Miracle économique », avec ses 10 % de croissance à l’année. En contrepartie,
le travailleur voit son salaire diminuer de moitié, déjà miné par une hyperinflation
et les inégalités sociales qui n’arrêteront plus de s’accroître. Tout cela sans
compter avec la disparition de la liberté d’expression, l’apparition de la
censure et de la répression politique permises par le vote de 5 amendements constitutionnels.
21 ans plus tard, le 15 mars 1985, Tancredo Neves sera élu au suffrage
universel, marquant le point final de la dictature et le début de la
re-démocratisation brésilienne.
Photographies de disparus (photos internet) |
Les rapports de l’époque révèlent
les noms de 376 morts et disparus durant le régime militaire. Cependant, certaines
études identifient plus de 1200 travailleurs ruraux tués par la dictature
pendant la même période. La Commission de la Vérité créée en 2011 tente de
relever les violations aux Droits de l’Homme entre 1964 et 1985, mais le travail
fastidieux est rendu difficile par le manque d’accès aux documents officiels
produits à cette époque. Contrairement à ses voisins ayant subi la même chose,
le Brésil a voté directement après la chute des généraux une loi d’Amnistie
blanchissant autant les prisonniers politiques que leurs tortionnaires, ne
permettant donc pas que justice soit faite comme en Argentine où Reynaldo
Bignone, le dernier général à avoir dirigé le pays pendant la dictature (1976-1983),
a été condamné le 12 mars dernier à la prison à vie pour crimes contre l’Humanité.
Consultez ces sites pour avoir
accès aux archives :
http://www.cnv.gov.br
Allana Andrade
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire