mardi 3 avril 2012

Le Brésil bientôt sur vos écrans


Le Brésil, un pays de plus en plus amateur de salles obscures (illustration internet)

Avec près de 144 millions d’entrées dans les salles obscures et 98 films nationaux présentés au public, le cinéma brésilien a vécu une année 2011 de qualité. L’an dernier a été celui de tous les records puisque les billeteries ont récolté la coquette somme de 1,44 milliards de reais (soit 600 millions d’euros environ) permettant au Brésil de se placer parmi les marchés cinématographiques les plus importants du monde. Mais, si les résultats sont au beau fixe, on note toutefois une baisse de régime pour les films brésiliens dont les entrées ont subi une chute de 30% par rapport à 2010 et atteignent difficilement le chiffre de 18 millions*. Eduardo Valente, responsable des relations internationales de l’Agence Nationale du Cinéma (Ancine) revient sur l'évolution du cinéma brasileiro et nous expose sa vision du 7e Art national.

Eduardo Valente, responsable des relations internationales de l'Ancine (photo: archive personnelle)

Eduardo, au début de chaque film brésilien apparait le nom de l’Ancine. Quelle est sa fonction?
L’Ancine est responsable de la réglementation de l’audiovisuel indépendant brésilien à chaque étape de la chaîne, de la production à la présentation en passant par la distribution. Elle prend également en charge la gestion des investissements fédéraux soit à travers des lois incitatives soit par des financements directs. Sa fonction est similaire, avec quelques différences près, à celle du CNC (ndlr Centre National de la Cinématographie) en France.

Le cinéma brésilien a une identité propre. Comment la définiriez-vous?
Le cinéma brésilien a une longue histoire de plus de 100 ans. Il serait donc réducteur de dire qu’il possède à peine une identité puisqu’il en a plusieurs bien distinctes. Bien sûr, il a de grands noms dans son histoire et des moments plus marquants que d’autres, comme toutes les autres activités culturelles du pays (musique, théâtre, littérature). Mais je pense qu’il est impossible de le définir en quelques phrases.

Le cinéma national a-t-il toujours été ainsi? On peut penser à l’influence du voisin américain…
Je ne pense pas que le cinéma américain soit la principale influence du cinéma brésilien bien qu’il soit énormément présent dans l’imaginaire du spectateur. D’ailleurs, certains des mouvements les plus connus au Brésil (comme la Chancada dans les années 40/50 ou le Cinema Novo des années 60 et 70) se caractérisent par la parodie ou la confrontation aux formes du cinéma américain. Le cinéma brésilien vit avec le cinéma américain une relation complexe faite d’admiration mais aussi de contestation.

La production brésilienne est-elle homogène ou certains centres sont-ils plus productifs que d’autres dans le pays?
 La production n’a rien d’homogène, ni dans sa forme ni dans sa distribution. Historiquement, la production a toujours été concentrée dans les deux principaux centres urbains du pays que sont Rio de Janeiro et São Paulo. Mais avec la diminution des coûts de production due à l’émergence des technologies digitales, la production s’est développée dans l’ensemble du pays. Aujourd’hui, d’autres États comptent parmi les grands producteurs comme le Minas Gerais, le Pernambouc, le Rio Grande do Sul, le Ceará ou encore Brasília.

Comment expliquer le récent succès du cinéma brésilien à l’étranger? On peut penser à Tropa de Elite ou aux productions locales comme le court-métrage sergipano Do outro lado do Rio...
Ces quinze dernières années, la production brésilienne a beaucoup augmenté en quantité  mais a aussi grandi en qualité. L’Ancine a fait l’effort de multiplier les possibilités de financement et a participé à l’internationalisation de la production en travaillant avec des festivals et des programmes d’exportation. Tout cela a permis au cinéma brésilien de renforcer sa présence à l’étranger.

Ce succès est-il le même au niveau national ou le public brésilien préfère-t-il encore les productions nord-américaines?
Le cinéma brésilien a représenté 15 à 20% du marché des salles de cinéma ces dernières années au Brésil. Cela indique une croissance et une solidification comme le montre l’énorme succès de Tropa de Elite 2 qui est le deuxième plus gros nombre d’entrées de l’histoire, après Titanic. Pour nous, c’est une victoire mais il peut encore grandir. Pour cela, il a besoin de plus de films à grands succès. Comme beaucoup d’autres dans le monde, le public brésilien a une relation historique avec le cinéma américain qui s’est imposé sur les marchés, conditionnant et habituant le spectateur à son modèle. Le changement de ce paradigme est long. 

Qu’en est-il des politiques publiques qui tentent de stimuler le cinéma brésilien?
De nos jours, le Brésil possède une politique consistante et évolutive pour le secteur. Elle se compose de nombreux mécanismes de financement, d’un travail constant dans les champs de la distribution et de la diffusion au-delà de la télévision et des nouveaux médias. Dans ce sens, l’Ancine a été essentielle pour créer une culture de participation active du gouvernement brésilien. Celle-ci doit s’adapter aux nécessités actuelles que nous voyons. Nous espèrons que cette évolution puisse continuer dans les prochaines années. 


*Toutes les données sont issues du rapport annuel de l'Ancine sur l'activité cinématographique brésilienne.

Propos recueillis et traduits par Gauthier Berthélémy

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