La Police Militaire de l'état de Bahia est en grève depuis plusieurs jours et occupe l'Assemblée législative à Salvador (photo internet)
Ce titre sensationnaliste pourrait être celui du dernier film d'action brésilien sorti en salle. Malheureusement, il n'est en rien celui d'une fiction. Car depuis plus d'une semaine, la Police Militaire de l'état de Bahia, dans le Nordeste, est en grève. Et avec des conséquences bien réelles et dramatiques. Explications.
Dans la nuit du 31 janvier, les troupes de la Police Militaire de l'état de Bahia, chargées d'assurer la sécurité publique, entre autres fonctions, se sont mis en grève. Depuis, plus de 10 000 agents, sur un contingents de 32 000 répartis sur l'ensemble de l'état, ont rejoint le mouvement. Au cœur des revendications des policiers, la mise en place d'un plan de carrière et l'augmentation des salaires, qui est d'environ 1800 reais pour un agent (soit 830 euros). Mais les grévistes demandent également la mise en place de primes de risque et de précarité, ainsi que de meilleures conditions de travail.
Et pour compliquer la situation, le gouvernement de Bahia a décidé de déclarer leur grève illégale, ce qui expose les douze leaders du mouvement à des peines de prison. A l'annonce de cette décision, plusieurs centaines de grévistes ont pris d'assaut l'Assemblée législative de l'état et l'occupent depuis cinq jours. Leur demande d'amnistie ayant été rejetée par le gouvernement fédéral, le mouvement s'est radicalisé. Encerclée par des troupes venues en renfort dans la capitale bahianaise, l'Assemblée occupée est désormais le théâtre d'affrontements violents entre policiers. Entre tirs de flashball et négociations, le dénouement de la crise semble encore loin d'être atteint.
Cet arrêt de travail a provoqué une vague de violence dans la capitale Salvador et dans l'ensemble de l'état. En comparaison avec les données de l'année dernière, à la même période, le nombre d'homicides dans la capitale et sa région a plus que doublé, atteignant le nombre de 135. En plus de ces meurtres, l'absence de policiers dans les rues provoque la multiplication des braquages et pillages de magasins, de bijouteries, sans compter les nombreux cambriolages, parfois perpétrés en pleine journée. Le nombre de vols à la tire et d'agressions à la personne a explosé dans la ville de la Baie de tous les Saints. Une situation préoccupante en pleine période touristique dans cette agglomération qui accueille chaque année plusieurs millions de touristes venus découvrir les beautés du Pelourinho ou la douceur du quartier de Bomfim.
Les troupes fédérales sont venues en renfort dans la capitale bahianaise (photo A tarde)
En plus de ces conséquences directes, une autre, à première vue anecdotique, inquiète les autorités et la population. Si la grève vient à se prolonger, le très célèbre Carnaval de Salvador pourrait être annulé. Car, sans présence policière, la sécurité des participants et des artistes ne pourraient pas être assurée. Convoqués, hier, par le comité d'organisation du Carnaval, les artistes programmés ont exprimé leur inquiétude et leur désarroi face à la situation. L'annulation du Carnaval serait un véritable manque à gagner pour la ville et pour le gouvernement de Jackson Wagner puisqu'il génère chaque année plusieurs centaines de milliers d'emplois directs et indirects, constitue une source importante de revenus et une vitrine internationale pour la ville. A titre d'exemple, près de 8000 personnes ont déboursé 2500 reais pour faire partie du 'bloc' suivant l'emblématique Chiclete com Banana (groupe de Axé très populaire dans le Nordeste et le pays) pendant les quatre jours de fête. L'annulation de cet événement majeur provoquerait une immense confusion et un coût énorme pour les autorités.
L'intérieur baiano n'est pas épargné
Mais la ville de Jorge Amado n'est pas la seule à souffrir de l'absence de policiers dans ses artères. Dans les terres, la situation tend à se dégrader de la même manière. Les agressions et les homicides ont également augmenté. Vitoria da Conquista, dans le sud de Bahia, a été marquée par des expéditions dévastatrices deux jours de suite. Des groupes de braqueurs organisés ont investi le centre-ville, détruisant et pillant tous les commerces qu'ils ont pu trouver sur leur passage.
Dans les petites villes situées aux alentours, le même scénario s'est répété. A Brumado, cité de 75 000 habitants, les commerces et les bâtiments bancaires et administratifs sont désormais fermés à partir de midi. De manière générale, la vie est au ralenti et les écoles qui devaient rouvrir leurs portes le 6 février sont restées closes pour éviter tout problème.
Le mouvement des policiers militaires pourrait ne pas s'arrêter aux frontières de l'Etat de Bahia puisque les agents d'autres états ont déjà fait part de leur soutien aux insurgés de Salvador. Un appui qui s'accompagne d'une menace de grève. Selon Almir Rosa, commandant de la Police Militaire de Rio de Janeiro, une réunion devrait se tenir aujourd'hui (9/02) pour décider d'un mouvement dans l'état carioca. Si la grève était votée, un appel à la mobilisation nationale pourrait être lancé.
Gauthier Berthélémy
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